Ciel de Case

... Suite du feuilleton. Bon ben voilà. Une semaine d'attente. Un réglage du "scan field" toutes les 5mn en plus du déclenchement au mouvement, des centaines de prises, mais rien en boîte. Malgré tout, contente 1) de ne pas me l'être fait piquer, 2) de constater que les piles ont tenu sur toute la durée et qu'il a bien supporté les aléas climatiques. Mes futures premières images n'en auront à mes yeux que plus de valeur. Y'a plus qu'à recommencer pour 15 jours, sans scan field qui encombre inutilement la mémoire. Mais que c'est chiant à paramétrer !

 Et 2 tinamous cendrés en guise de galinettes !

Souvenir de la toute dernière sortie (16 mars 2020), juste avant le 1er confinement. Mitraillage du Corallus caninus.

Merci à Nico pour la photo ;)

Plusieurs mares visitées, 7 phylloméduses carénées et 8 tigrines plus haut perchées.

Les chants des D. minutus par salves.

Merci à Estelle de m'avoir montré la mare qu'elle vient de trouver.

Un mâle de Trachycephalus coriaceus y barbotait, sacs vocaux fripés. Farouche, il plonge dès qu'on l'éclaire. Je suis étonnée de le voir si bon nageur - c'est profond d'un bon mètre, alors que cette espèce passe l'essentiel de sa vie dans les arbres. J'ai été surprise par sa taille modeste, étant habituée aux grosses Trachycéphales réticulées, qui s'invitent jusque dans les salles de bain.

Jeu du chat et de la souris. Il se cache sous les débris végétaux qui surnagent et l'écume des nids des leptodactyles, et pointe les narines pour respirer.

C'est une grenouille que j'avais découverte à travers les publications de Thierry Montford, et qui m'avait fait très forte impression, avec ses sacs vocaux disproportionnés et ses couleurs de pain d'épices.

23h

2 nouvelles grenouilles : T. coriaceus et Dendropsophus counani, 1 nouveau lézard : Bachia flavescens.

Voilà le piège posé pour le coup d'essai. Sous la bruine. Bien ficelé. Difficile de trouver un tronc suffisamment vertical, et une zone suffisamment dégagée en savane. Les hautes herbes et la végétation en face remuée par le couloir de vent risquent de déclencher le dispositif, remplir la carte mémoire et vider les piles. L'ai-je fixé à bonne hauteur ? L'ai-je correctement paramétré ? Sur ce tronc mort trop frêle, qui casse comme du polystyrène, totalement à découvert, me le ferai-je prendre ? J'ai oublié d'acheter un petit cadenas pour bloquer la trappe. Pourvu que je le récupère. Réponse dans une semaine, je l'aurais bien laissé 3 semaines, mais je n'en aurai pas le loisir, et j'appréhende. 

Patte avant

Dans ce secteur, les traces de biche (daguet rouge) et de puma me laissent espérer autre chose que la bredouille. Je croise les doigts.

+  au moins 7 Nasua nasua dont 5 que j'ai vu circuler à la queue leu leu sur une branche dégagée, me dévisageant les uns après les autres.

Allobates_femoralis

Leptodactylus_knudseni

Nauclers à queue fourchue

7, puis 3 de plus, en lisière de forêt, en bordure de route, au niveau de la crique Soumourou. Il est 17h15, ils ont l'air d'être là depuis quelque temps déjà. Ils manoeuvrent pour attraper au vol dans leurs serres des coléoptères, des papillons et des libellules qu'ils grignotent ensuite rapidement toujours en l'air, en rabattant les serres vers le bec. Ils fientent en vol aussi. Ils semblent imités par une buse à gros bec qui teste plutôt timidement, cabotant d'un arbre à un autre.  L'heure paraît propice à la dispersion des insectes. 

Bientôt, très vite, il n'en reste plus que 3, puis 2. Je suis arrivée un peu trop tard.

+ Notharchus macrorhynchos

Le noir de la nuit naissante se dilue encore dans les nuances d'indigo, et se libèrent les chants les plus purs et les plus poignants, et se disperse l'étoffe d'effluves indéchiffrables.

Les lisières antérieurement défrichées, des secteurs impraticables, défendus par des chevaux de frise de salsepareilles, des plantes à barbelures, les herbes-rasoirs (Scleria secans), et derrière ces remparts les grenouilles que l'on devine à la portée de leurs chants étagés.

Heurtée par un bidule vrombissant, un dynaste ventru et bossu - un gros modèle - qui s'accroche obstinément de ses 6 pattes torves à ma frontale et mes cheveux.

+ Agouti paca

Leucophyllatus_multifasciata_minutus

Ces sprints que tu piques quand dans le no man's land tu t'es écartée de plus de 60m de ta voiture et que tu entends arriver une fourgonnette clandestine.

Retrouver la fraîcheur des 1ères rencontres avec une espèce animale ou une espèce végétale en fleur, cette incrédulité mêlée d'euphorie, une joie presque féroce, cet enchantement à la découverte d'une singularité bien réelle, tellement vivante, tellement présente, tellement là - "hyperréaliste". Il y a longtemps que je ne l'ai pas vécu.

Tout est présenté par Maël Dewynter dans l'article du 5 décembre sur Faune-Guyane :

Actualités - www.faune-guyane.fr

Amphibiens et reptiles de Guyane sous protection La Guyane, territoire français d'Amazonie, abrite une faune herpétologique terrestre particulièrement diverse. Actuellement, 124 espèces d'amphibiens (dont 115 anoures et 9 gymnophiones) et 161 espèces de reptiles (44 lézards, 3 amphisbènes, 99 serpents, 11 tortues terrestres et 4 caïmans) y sont répertoriées.

https://www.faune-guyane.fr

Saguinus midas. Pour le mythe : Dionysos offre à Midas, petit roi de Phrygie, d'exaucer le voeu de son choix. Midas est cupide. Il souhaite devenir le roi le plus riche, et par conséquent le plus puissant de la région, et se croit bien inspiré de demander que tout ce qu'il toucherait désormais se transmute en or. Les premiers instants il se félicite de son choix qu'il estime excellent, mais il s'aperçoit bientôt qu'il ne peut plus serrer ses enfants contre lui, ni boire ni manger. Il est condamné. Se repentant amèrement, Midas supplie Dionysos de le délivrer du piège qu'il s'est lui-même forgé. Il devra se rendre à la source du fleuve Pactole pour se laver de son avarice. On dit que c'est pour cette raison que le fleuve charrie des paillettes d'or.

Et l'à-propos des scientifiques a transposé et fait renaître le mythe ! :)

Les voitures font partie du paysage familier de ces tamarins à mains dorées qui m'observent sans crainte. 8 en tout qui ont finalement traversé les uns après les autres juste devant ma voiture.

C'est souvent compliqué de photographier les singes : ils n'aiment pas être regardés frontalement ou droit dans les yeux car cela s'apparente à une provocation, à l'envie d'en découdre. Eux-mêmes n'observent jamais que de biais, à la dérobée. Ils ne fixent jamais dans les yeux bien longtemps.

Des paluches énormes, essentielles à leur vie arboricole, des "poignes" aux doigts et aux paumes particulièrement charnus, recouverts d'un cuir souple et épais. Des mains tellement grosses qu'on les croirait polydactyles. Et des oreilles en feuille de chou.

Les queues totalement relâchées... peut-être seulement en apparence. N'empêche, je n'avais jamais vu de tamarins aussi tranquilles. 

Le passage d'un 4x4 rompt le calme de ces deux-là. Le groupe s'écarte pour revenir peu à peu.

Un quart d'heure en leur compagnie, et encore quelques instants à les regarder se déplacer en hauteur une fois tous traversés.